Chaque dimanche après la Pentecôte, les catholiques célèbrent la Sainte Trinité : non pas trois dieux mais un seul Dieu en trois personnes, Père, Fils, Esprit. Ce mot “Trinité” n’est pas employé dans la Bible, bien qu’on parle du Père, du Fils et de l’Esprit. Le théologien Tertullien crée ce mot à la fin du 2e siècle, qui suggère le pluriel (tri) et l’unité (unitas). Il est le fruit de la réflexion ecclésiale de presque deux siècles sur les activités différentes des trois personnes divines qu’elles exercent dans l’unité et la communion.
Dieu est unique mais il n’est pas seul. Jésus le révèle comme un Père plein de tendresse et de miséricorde qui prend plaisir à pardonner. Il envoie son Fils qui nous communique l’Esprit. La Trinité n’existe qu’en se donnant, en se recevant, en se partageant. Autrement dit, Dieu n’est qu’amour. Il est l’anti-pouvoir, l’anti-Narcisse, l’anti-indifférent.
La Trinité est toujours en état de don et de rayonnement, d’où sa joie. “Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé” (Jean 3, 16-17).
Dieu est amour, don, communion. Le monothéisme chrétien est un monothéisme trinitaire. Dieu est Un et Trine : le Père créateur, le Fils unique de même nature que le Père, l’Esprit qui procède du Père et du Fils. C’est mathématiquement clair en christianisme, mais difficile à comprendre. Un plus un égale Dieu, ou trois. Pour Grégoire de Nysse, un évêque du 4e siècle, le Père est comme le soleil, le Fils, les rayons, et l’Esprit est la chaleur qui émane de l’ensemble. L’Esprit est tout l’amour partagé entre le Père et le Fils. Le Père aimant dépose dans le Fils aimé son Esprit d’amour qui déborde jusqu’à nous. Ils sont trois ayant un même et identique amour.
En Dieu il y a l’Aimant, l’Aimé et l’Amour, écrit saint Augustin, qui entreprit une recherche très poussée sur la Trinité. N’a-t-il pas dit que tenter d’expliquer ce mystère, c’est comme vider la mer avec une cuiller ? Thomas d’Aquin, dont la Somme théologique porte l’empreinte d’une réflexion philosophique sur la Trinité, constatait à la fin de sa vie que tout ce qu’il avait écrit était de la paille ! La raison se bute à un problème insoluble quand elle veut définir ce dogme chrétien de la Trinité. Reste l’art, l’amour, le silence, la prière, l’adoration.
Heureusement, il y a la théologie vécue des saints et des saintes, l’expérience des témoins et des mystiques, comme la bienheureuse Élisabeth de la Trinité, carmélite de Dijon du début du 20e siècle. Elle plonge dans le ciel de son âme pour se reposer dans ses Trois et faire ainsi la joie de Dieu. Elle nous a laissé une belle prière qu’elle a écrite d’un jet le 21 novembre 1904, “O mon Dieu, Trinité que j’adore“.
Voici la dernière strophe : “Ô mes trois, mon Tout, ma Béatitude, Solitude infinie, immensité où je me perds, je me livre à vous comme une proie. Ensevelissez-vous en moi pour que je m’ensevelisse en vous, en attendant d’aller contempler en votre lumière l’abîme de vos grandeurs.”